Le fait d’innocenter Dieu du scandale du mal, voilà ce que Leibniz, un philosophe allemand du XVIIe siècle appelait la théodicée. Appliquée à la gouvernance camerounaise, cette théodicée donne précisément ceci : Monsieur Paul Biya est excellent, c’est son entourage qui est très mauvais. Telle peut se résumer la conviction politique du biyaïste fanatique qui vient d’être curieusement expulsé du RDPC par Monsieur Paul Biya, le président national de ce parti. À la lumière de la pensée, cette analyse froide au terme de laquelle on peut pertinemment émettre un jugement de valeur, la conviction du professeur Pascal Charlemagne Messanga Nyamding, qui est la version pastichée de la théodicée leibnizienne, suscite quelques doutes qu’on peut formuler à travers les questions suivantes : si la qualité de l’entourage politique du mentor de ce biyaïste fanatique laisse à désirer, à qui la faute ? Le professeur ne porte-t-il pas sérieusement atteinte à la souveraineté populaire qu’incarne Monsieur Paul Biya en soutenant, dans son plaidoyer en justification de l’extrême bonté de ce dernier, qu’il est mal entouré ? Pour contourner cette difficulté, on peut se permettre de penser qu’il s’entoure mal. Dans ce cas, pourquoi lui plaît-il de s’entourer de telle sorte que sa politique de rigueur et de moralisation n’ait aucune chance de prospérer ?
La mésaventure politique du professeur Messanga Nyamding, qui rappelle celle du serpent qui creva pour avoir commis la faute de mordre Fréron1, indique qu’il sévit dans le Rassemblement démocratique du Peuple camerounais une sévère crise du dissensus. C’est pour cette raison que ce parti politique procède au rassemblement de ses militants dans le paradoxe. Ce paradoxe consiste effectivement à exclure ou à expulser du RDPC les militants qu’on devrait plutôt y rassembler, nonobstant leur tendance irrépressible à mordre ceux que ce parti politique tient à protéger des morsures venimeuses des serpents non domesticables.
L’expulsion de Monsieur Messanga Nyamding du RDPC, en dépit du culte politique qu’il voue à Monsieur Paul Biya, est un message : gare à tous ceux qui oseront, au sein du RDPC, se doter de la psychologie du serpent, dans l’oubli que leur venin n’est pas aussi virulent et mortel que celui de Fréron !
Lucien AYISSI
Philosophe
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1 Cf. cette épigramme de Voltaire :
« L’autre jour au fond d’un vallon
Un serpent mordit Fréron.
Devinez ce qu’il arriva ! Ce fut le serpent qui creva. »