Julius Ayuk Tabe, leader séparatiste et neuf de ses coaccusés ont été reconnus coupables, entre autres, de terrorisme, sécession, apologie des actes de terrorisme, hostilité à la patrie et condamnés à la prison à perpétuité ce mardi 20 août 2019 par le tribunal militaire de Yaoundé.
La main du juge n’a pas tremblé. Le verdict, particulièrement lourd, est tombé ce 20 août 2019 à 5h 37 mn au tribunal militaire devant lequel comparaissaient l’accusé Ayuk Julis S. Tabe leader séparatiste de la république imaginaire d’Ambazonie et 9 neuf de ses coaccusés Foh Gallafor, Tassang Wilfrieg Fombang, Henry Kime, Konelus Kwangas, Fidelis Ndeh Djeh, Augustin Awasun, Ojong Okwongo, Eyambe Elias. Comme un couperet : condamnation à perpétuité et à s’acquitter solidairement des dommages de 250 milliards de FCFA à l’État du Cameroun.
Des sources proches de la défense, les avocats étudient la possibilité d’interjeter appel. Certains avocats ont d’ailleurs qualifié cette condamnation de
«parodie de justice ».
La lourdeur de la peine a surpris plus d’un observateur au regard de l’attitude de Ayuk Tabe qui, ces derniers temps, avait montré sa disposition conditionnée à la négociation avec les pouvoirs publics en vue de la recherche des solutions pour le retour à la paix dans les deux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (NOSO) où le conflit, qui a fait plus de 2000 morts, près de 530 000 déplacées, dure depuis presque 3 ans. Cette disposition à la discussion, même assortie des préalables, l’avait fragilisé dans les milieux séparatistes qui n’avaient pas hésité à dénoncer sa « traitrise »
Un tweet publié après le verdict par le ministère de la Communication du Cameroun affirme que « dix des leaders sécessionnistes poursuivis devant la justice camerounaise ont été condamnés chacun, entre autres, à l’emprisonnement à vie. La Justice de la République, souveraine et indépendante, s’est donc prononcée. Le Gouvernement en prend acte »
Faut-il le rappeler, Julius Ayuk Tabe et ses coaccusés avaient été arrêtés au Nigeria en janvier 2018 et extradés à Yaoundé, une extradition que la justice nigériane a depuis jugée illégale.
Le Cameroon People parti (CPP) par la voix de sont secrétaire général, Franck Essi
«s’étonne que l’on puisse, sur une affaire aussi sensible, procéder à une condamnation dans des conditions aussi cavalières que discutables.
Le CPP condamne les multiples violations des lois et procédures qui ont caractérisé aussi bien l’arrestation, la détention que le jugement de ces personnes partisanes de la sécession. Pour réaffirmer la force de la République, l’unité de la Nation et l’Etat de droit, il est nécessaire de respecter scrupuleusement les lois et procédures nationales ainsi que les conventions internationales que nous avons librement adoptées, ratifiées et promulguées.»
Selon un observateur, « cette condamnation va accentuer les tensions dans ces deux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest ». Un autre observateur averti affirme : « Il était normal que face à la gravité des charges qui pesaient contre les accusés, la main des juges soit très ferme et lourde. Il s’agissait pour l’État et le président de la République de transmettre un message d’intransigeance à tous ceux qui tenteraient de remettre en question l’unité territoriale du Cameroun. Donc ici, il y a eu une stricte application des dispositions du Code pénal au regard de ce qui leur était reproché.
Cependant, avec le contexte politique qui prévaut dans le NOSO, on peut lire derrière la subite accélération de cette procédure qui a débouché sur leur condamnation, une volonté des pouvoirs publics, surtout du président de la République, de faire en sorte que le jugement soit définitif avant qu’il ne leur accorde une grâce, en bon père de famille qui voudrait apaiser les tensions et les cœurs dans le NOSO, si je tiens compte des tractations qui avaient lieu en coulisses. »
L’évolution de la situation, au cas où les avocats des condamnés interjettent appel ou non, permettra de mieux affiner les analyses et de décrypter les intentions du président de la République.
En attendant, les condamnés continueront de méditer leur sort derrière les barreaux
Fabien Okonkwo