Embouteillages et Lignes Rouges : le chant camerounais des partisans

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Christelle Nadia Fotso. Photo: DR

Ami, entends-tu la voix de Zogo, de tant d’autres Camerounais lâchés puis mis à mort par un état en qui ils ont cru sans être parfaits et sans exiger qu’ils le soient.

Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu’on enchaîne. Ce sont ceux de ces morts calomniés, mal enterrés qui se déchaînent, écœurés devant ce spectacle du chacun pour soi.

Ohé. Partisans, bendskineurs, taximen, débrouillards, chercheurs d’argent l’alarme resonne depuis fort longtemps.

Aucun grand soir n’est possible ; l’ennemi ne connaîtra ni le prix du sang ni les larmes.

Il n’est pas que parmi nous, il est nous ! En Afrique, les hirondelles font le printemps.

Le Chant des partisans camerounais est trop lourd, trop gras, trop saignant et trop cafouillé pour être entendu. Il ne peut provoquer de sursaut et mener à des révoltes pourtant nécessaires. Le socle et le bien communs s’effondrent. Un Cameroun en perdition et en voie de disparition. Son histoire contrefaite, la mémoire de ses morts exploitée pour effacer ce qu’ils attendaient de leur pays, de leurs héritiers et de leurs concitoyens : décence, humanité et une haute idée de l’état et du service public afin que la pauvreté cesse d’être un alibi à la médiocrité en conduisant à la misère et au déshonneur.

Un homme aurait été exécuté par le pouvoir. Ses concitoyens continuent de camerouniaiser en transformant le deuil et le combat pour la justice en un spectacle cheap. Les fureurs camerounaises ne sont même pas adolescentes, elles sont gamines. L’affaire du moment, piteuse télénovela, commence et finit toujours de la même façon…une ascension fulgurante et inexplicable puis la chute météorite et bruyante de ces monstres que le Cameroun fabrique, que l’État parasite et que les sociétés adoubent puis vomissent : Jean Pierre dindonne et devient Zomloa des Zomloa ; Bruno se baisse, se rabaisse, Bidjance pour devenir indispensable ; Melissa n’est pas une métisse d’Ibiza, mais le dernier accessoire bling bling prête à aimer son ZZ en allant à la recherche non pas du temps perdu, mais de ses qualités ; Ivana n’est pas chef d’État, ne Trumpe pas et aime follement sa m’amour qu’elle retape… Roman sirupeux à l’eau de rose, trop beau pour être vrai, mais les Camerounais applaudissent et ayopisent parce qu’ils sont des suiveurs, des buveurs, des lécheurs, des lyncheurs, des lâcheurs, plus d’honneur pas de leaders bel et bien des njitapeurs, mais cela, il ne faut pas le dire parce que c’est de trop…

Le Sacre ayant été une fête, la déchéance doit l’être aussi. S’il y a bien une chose que L’Anecdote et Vision 4 ont réussie, c’est à parfaire la quincaillerie de charlatans qu’est le Cameroun où l’art de Raoul Biaiser est essentiel : servir le pouvoir, idolâtrer les gagnants, humilier les perdants et flinguer les réfractaires en oubliant que les rats ne quittent qu’un navire qui chavire. Trivialiser, tribaliser pour rendre la décadence du Cameroun divertissante. Il n’y a plus des situations où l’idéologie est interdite et les jeux de pouvoir hors de propos. Les populations sont non seulement perverties par la servitude, mais elles sont cocufiées et contentes de l’être. La dépravation et la luxure permettent de survivre, de manger et de temps à autre de se rassasier si on sait vendre son prochain, son sang ou soi-même. Gérontocratie inénarrable où les Patriarches ne sont pas que des sages, mais en majorité des midinettes parfais gâteuses ; pétaudière du vice ingouvernable. C’est trop bouillant pour être vrai, mais les Camerounais applaudissent et ayopisent parce qu’ils sont des suiveurs, des buveurs, des lécheurs, des lyncheurs, des lâcheurs, plus d’honneur pas de leaders, mais bel et bien des njitapeurs, mais cela il ne faut pas le dire parce que c’est de trop…

Le corps du mort défiguré devrait provoquer un soulèvement populaire puisqu’il montre que la vie camerounaise n’a aucune valeur pour l’État et ses serviteurs confirmant le péril des faibles et des handicapés…Mais l’occasion est trop belle pour ne pas rentabiliser la chute et régler des comptes en faisant semblant de demander justice. Le peuple ne veut que des coupables. Dénonciations succulentes et révélations étourdissantes…Dossiers noirs du samedi soir et ses pales imitations…Personne ne pouvant faire du JPoint mieux que JPoint, surenchère, caricatures et propagande sucrées : une clinique et son papa, des ratés et des cons qui osent tout en suçant jusqu’aux os cette tragédie à coups de live en lunettes de soleil…coup d’éclat et de folie permanents…Pom bia, Apilkoro, Sardinards, Talibams, extrémistes bamilékés, ennemis de la nation, justiciers et complotistes… aucune analyse tant la boue gave et saoule… Activisme bayam sellam de starlettes, de clones, et de sophistes aux âmes décapées… Manichéisme de bas étage puisqu’il n’est question que du diable et du Bon Dieu, de gens qui boivent du sang et du sperme en vendant leurs âmes et leurs corps pour réussir… Les passions sont rabaissées par la bêtise, l’inculture et les sentiments les plus laids ont un exutoire. Schadenfreude. C’est trop répugnant pour être vrai, mais les Camerounais applaudissent et ayopisent parce qu’ils sont des suiveurs, des buveurs, des lécheurs, des lyncheurs, des lâcheurs, plus d’honneur pas de leaders, mais bel et bien des njitapeurs, mais cela il ne faut pas le dire parce que c’est de trop…

Des Chefs traditionnels ont feint l’audace dans la comédie habituelle camerounaise où les pleureuses demandent réparation en performant une dance du ventre grossière sachant très bien qu’elles seront achetées et pourront se taire en disant « on a eu notre part ! » Une association de journalistes et un barreau qui ne sont prêts qu’à enfoncer des portes ouvertes en ayant une confraternité d’occasion. Presque personne pour dénoncer le fait qu’un bébé passe des jours en prison. Ah, les empreintes salaces que laissent ces clowns tristes que sont de petits bâtonniers émérites, mais éternels carriéristes qui surfent sur la vague en découvrant que le crime rapporte au Cameroun, que l’État en profite et qu’il n’y a pas de Garde des Sceaux. L’odeur de l’haleine de ces bouffons du vide, rapaces et limaces de professions jadis nobles qui ne portent que le noir pour briller, jacasser partout en espérant avoir leur nom comme celui de Martinez dans le quotidien le Monde.

L’attention internationale attire les arrivistes et accentue l’indécence de toutes les impostures. Les vautours et les charognes guettent, calculent. Ils n’ont de l’audace et de l’humanité que par intérêt et pour le nkap. Jeu de dupes pour ne pas percer l’abcès et aller plus loin parce qu’après tout c’est l’Afrique, que le Cameroun c’est le Cameroun, que toutes les victimes y sont coupables et les plus gros bourreaux privilégiés. La phrase toute faite, flamboyante et jouissive d’un politique polyvalent affirmant que l’esprit de Zogo hantera ses adversaires politiques, affirmation sinueuse qui force une réponse attendue d’une mère estropiée : celui du Dernier Bamiléké hantera également ceux sans conscience qui voient, savent, taisent toutes ces horreurs pour leur ventre ou de petits triomphes sans gloire. Trop de dépouilles profanées impunément tant l’héroïsme est suranné et moqué. Tout cela est trop vulgaire pour ne pas exploser, mais les Camerounais applaudissent et ayopisent parce qu’ils sont des suiveurs, des buveurs, des lécheurs, des lyncheurs, des lâcheurs, plus d’honneur pas de leaders, mais bel et bien des njitapeurs, mais cela il ne faut pas le dire parce que c’est de trop…

Le Cameroun se défait et est en train de mourir, le règne de Paul Biya de finir, le temps de ses oligarques de passer. L’avenir n’est pas qu’hypothéqué, mais vendu. Toutefois, les populations asservies et terrorisées passent à côté du film parce qu’il y a une addiction forte au divertissement, à ces affrontements de Tartuffe gladiateurs qui ne luttent plus que pour le pouvoir et l’argent en mettant le pays à genoux. Conscients que puisqu’il n’y aura qu’un seul chef, le Cameroun est pris en otage. Choisir son camp ; détruire les adversaires tout en infantilisant les peuples, privatisant l’état et faisant de tout faible, tout révolté un œuf qu’on casse pour faire une baveuse et graveleuse omelette. Faux patriotes, partisans d’opérettes, supporters vindicatifs et apprentis sorciers dopés qui se cherchent désespérément des prestidigitateurs. La citoyenneté n’a aucune valeur. Le mérite est illusoire. Tous les sacrilèges possibles et potentiellement rentables. C’est trop inconséquent pour être sans conséquences, mais les Camerounais applaudissent et ayopisent parce qu’ils sont des suiveurs, des buveurs, des lécheurs, des lyncheurs, des lâcheurs, plus d’honneur pas de leaders, mais bel et bien des njitapeurs, mais cela il ne faut pas le dire parce que c’est de trop…

Un homme a été sauvagement assassiné. Pour occulter la chair, le sang et le sens, il faut un feuilleton, un vaudeville pour faire diversion afin que les Camerounais ne réalisent pas que c’est leur État et leur pays qui sont brutaux et apprennent le terrorisme aux Ambazoniens. Le Cameroun n’appartient qu’à quelques individus qui connaissant les faits, fabriqueront une vérité afin de choisir qui jeter à la vindicte populaire pour calmer, envouter et perpétuer un système pourri qui ne peut produire des inégalités, des injustices et déshumanise tout le monde même le Chef. C’est trop absurde pour durer, mais les Camerounais applaudissent et ayopisent parce qu’ils sont des suiveurs, des buveurs, des lécheurs, des lyncheurs, des lâcheurs, plus d’honneur pas de leaders, mais bel et bien des njitapeurs, mais cela il ne faut pas le dire parce que c’est de trop…

Trop de testostérones, plus suffisamment de neurones, le chant camerounais des partisans est inaudible et ne prend pas corps. Il ne peut être ni beau ni mélodieux tant les réalités dépassent tous les pires cauchemars.            Les partisans camerounais ne sont pas que des sans-dents, mais quasiment tous des sans-couilles, membres d’une société marchande de consommation totalitaire.

Camerounaises, Camerounais, que nous sommes minables prostitués plus ou moins malgré nous par des Falstaff, des Iago et des Rastignac pour qui puisqu’aucun nègre n’est innocent, rien ne leur est interdit ! Le Cameroun n’est pas une patrie, mais un ensemble de terres et de machins à travestir, à louer et à vendre.

La haine à nos trousses, la faim qui nous pousse, la misère est certes une explication, mais pas une excuse pour accepter tant d’absurdités, d’indignités et de monstruosités… la camerounité est un fardeau. De grâce, finissons-en et njitapons-nous ! On va faire comment !

Pour le Cameroun et les Camerounais, il n’y a plus de lignes rouges, donc embouteillages aux portes du purgatoire et de l’enfer.

Christelle Nadia Fotso

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